Chapitre 19 : La guerre des villes soeurs

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Myrek ouvrit les yeux. Devant lui s’étendait une plaine verdoyante à perte de vue. Des oiseaux nombreux volaient dans le ciel et des troupeaux broutaient dans les pâturages au loin. Il se tenait sur un mur de pierres lisses et propres, accoudé aux créneaux. Et sous ses pieds, se trouvait la grande avenue. Plus grande route entrant dans la ville, c’était par là qu’arrivaient tous les voyageurs et tous les marchands. C’était là que du matin au soir, les charrettes piétinaient en embouteillages, les draperies de Gélonde amassaient la poussière, les épées du nord faisaient leur concert cliquetant d’acier. Cette vue était une vue ordinaire pour un soldat de Namas Cintas affecté à la muraille. Dans une crique bien protégée, la cité étendait son influence bien loin au nord et au sud, s’étendant sur toute la rive de la mer de l’aîné, qui avait donné son nom à la ville et ce jusqu’à l’océan des Elfes au sud et à la mer du cadet au nord. Elle n’avait pas grand-chose à craindre de ses voisins, avec qui elle avait noué de nombreux traités de commerce, et personne du monde des hommes n’aurait été assez fou pour braver la marine Cintienne, réputée jusqu’à l’autre bout du continent. La vie était donc plutôt paisible en ce coin du monde, et le soldat n’avait pas réellement à s'inquiéter de ce qui adviendrait. Il se releva et reprit donc sa ronde, sifflotant et révant du repas que sa femme lui préparerait pour le soir et qu’il partagerait avec son fils et sa fille.

 

Myrek se retourna vivement. Il était certain d’avoir entendu un bruit dans les buissons derrière lui. Et dans la forêt des Elfes, n’importe quel bruit aussi infime soit-il pouvait provenir de l’un d’eux. Ils étaient particulièrement doués pour se cacher et se faire discret, et techniquement, il n’aurait rien du craindre d’eux. Mais dernièrement, ces créatures se comportaient bizarrement. Il avait été reporté que des processions se faisaient tard dans la nuit, montant dans les montagnes. De longues processions d’Elfes en robes, capuchons relevés et torches à la main. Ce devait être quelque secte étrange, quelque rite oublié des hommes, mais même le commerce avait été coupé et plus aucun navire n’était autorisé dans leurs ports. C’était un problème majeur, les routes commerciales vers l’Est passant toutes par leur territoire ou le long de celui-ci, c’était tout le monde Est qui devenait inaccessible à Namas Cintas ! Le chasseur laissa ses yeux traîner dans les sous-bois. Il n’aurait jamais dû accepter l’argent de cet homme. C’était évident qu’il courrait à sa perte à s’introduire chez les elfes et à tenter de les suivre tandis qu’ils faisaient leurs affaires occultes. C’était évident qu’en forêt, en pleine nuit, il n’aurait aucun moyen de les suivre et de mieux se cacher qu'eux ne sauraient le retrouver. Et c’était évident, qu’il allait finir par en croiser un comme là il croisait un regard dans l’obscurité à peine transpercée par la lueur de la lune !

 

Myrek remonta à bord de son navire en tempestant de leur mauvaise fortune. Il avait vogué toute sa vie sur la mer du cadet, multipliant les aller retours entre Namas Cintas et Stapsea, acheminant marchandises et hommes, parfois pour les duc ou les évêques eux même ! Et voilà qu’on lui refusait l’accès au canal soit disant parce qu’il était cintien ? Il allait faire quoi lui de toutes ses marchandises s’il ne pouvait pas les acheminer à leurs acheteurs ? Parce qu’il n’allait pas descendre toute la rivière pour aller les chercher, c’était à lui de les monter jusqu’à l’embarcadère en amont dans les terres ! Il avait entendu des rumeurs de ports fermés dans les duchés du sud pour les Cintiens, mais il n’avait pas voulu y croire. Si le commerce ne passait plus là, Namas Therent au nord allait être complètement isolée de sa cité sœur au sud, et tous les duchés allaient perdre en revenus ! C’était la faillite assurée pour tout le monde si la situation restait ainsi, et la vue qu’il avait de son nid de pie ne pouvait que le conforter dans son idée ! Des dizaines de navires marchands étaient alignés sur la plage, leurs équipages se mélangeant sur la berge. Certains devaient être là depuis des jours, voire des semaines, si l’on en croyait tous les marchands ambulants qui se promenaient entre les hommes et toutes les tentes montées plus loin sur la terre ferme. Quelle est cette folie, pensa-t-il en redescendant jusqu’au pont.

 

Myrek releva la tête. Il faisait chaud en cette après-midi d’été, mais l’heure n’était pas au repos. L’embargo de Namas Therent sur Namas Cintas avait pesé lourd sur les importations de nourriture et tout le pays était au rationnement. Il se passa la main sur le front, se massa la nuque qu’il avait douloureuse et se remit à labourer le champ. Lui, pauvre paysan, était bien loin de toutes les intrigues de cours, mais un colporteur était passé il y a peu dans leur village, et avait rapporté que toute cette histoire n’était que les conséquences d’une dispute entre les princes héritiers des deux cités. Il n’en savait pas beaucoup plus, et cela pouvait même être un des nombreux ragots que ces gens aimaient à colporter avec leurs marchandises, mais le nombre de fois que cette histoire était répétée, et par des gens de passage assez différents, tendait à la rendre crédible. Donnant de violents coups de son outil dans la terre, il ne pût s’empêcher de ressentir une certaine rage. Si cela était vrai, si une simple dispute entre deux princes pouvait amener un pays à en affamer un autre, quelle légitimité avaient ces princes à gouverner ?

 

Myrek avançait rapidement. Le prince l’avait convoqué dans ses quartiers. Ce gamin pédant, obséquieux et détestable avait besoin des conseils avisés de l’officier de la garnison. Comme s’il n’avait pas déjà suffisamment sur les bras avec le recrutement forcé qu’il avait décidé d’instaurer pour remplir les rangs de l’armée. Evidemment que les citoyens allaient se rebeller ! Voilà des mois qu’ils étaient affamés, que le commerce était interdit par les Elfes à l’Est et que le nord faisait Embargo ! Seul collaborateur qu’il lui restait, Gélonde faisait grimper les prix de toutes les marchandises, profitant du fait que Namas Cintas n’avait plus personne d’autre vers qui se tourner ! Et tout ça à cause d’une dispute entre ce gamin et le prince de Namas Therent ? S’il n’en tenait qu’à l’officier, il lui aurait déjà tranché la gorge il y a des années à ce morveux. Déjà que les villages frontaliers subissaient des raids des Thérenciens, si la situation continuait à s’envenimer, la guerre allait éclater. Et tout ça parce que le rejeton royal refusait de revenir sur ses revendications ? L’officier en venait quelquefois à haïr son supérieur, et aujourd’hui était bien l’un de ces jours !

 

Myrek partit d’un rire tonitruant. Qu’il était bon de pouvoir laisser libre cours à ses pulsions. L’homme se retourna vers ses camarades et les flanquas de grosses claques amicales dans le dos. Ils étaient heureux, être là, au milieu des flammes et des cadavres, au milieu de tout ce butin qu’ils avaient trouvé dans le village. Un homme sortait d’une maison, tenant par les cheveux une femme à la tunique déchirée. Son visage était tordu de douleurs et des larmes coulaient de ses yeux mais elle ne semblait plus n’être qu’une coquille vide. Les gars avaient dû s'amuser un peu trop pour la demoiselle. Se promenant entre les maisons écroulées, il se réjouissait des cris qu’il entendait et qui faisaient comme une douce musique à ses oreilles. Les ordres avaient été clairs, tous les villages qu’ils rencontraient sur leur passage devaient être rasés, et il ne devait pas rester un seul survivant. Quel plaisir d’entendre de tels ordres. Qui auraient cru que lui et ses gars allaient être recrutés par cette soi-disant vertueuse, Namas Therent. Pour guerroyer contre sa cité sœur qui plus est ! Et dire que ces cités avaient été fondées par deux frères qui s’aimaient. Il se délectait d’une telle ironie, et entendant des pleurs étouffés dans la maison devant laquelle il passait, il n’allait pas se délecter que de cela.

 

Myrek se pencha par la fenêtre pris d’une violente douleur et rendit son repas. Elle était haute dans la tour du château et fut prise de vertige. La nourriture avait dû être avariée. Elle avait bien senti un goût bizarre dans le roti de ce soir, mais avachie sur les marches de pierres, elle ne pensait pas que cela lui ferait aussi mal. Elle fondit en larmes. Se nourrir était déjà difficile quand il ne s’agissait que d’un embargo, mais maintenant que la guerre était déclarée, même les tables du château avait du mal à être servies. Toute la nourriture disponible allait aux soldats au nord tandis que la ville mourrait de faim. Les rues étaient vides, les cadavres des plus miséreux étaient jetés dans les ruelles sombres, les rats infestaient les égouts. Elle regarda par la fenêtre et vit la lune, au loin, dans le ciel étoilé. Qu’est-ce qui peut réellement valoir autant de morts ?

 

Myrek se coucha, épuisé. Il ne prit même pas la peine de retirer son armure ou sa ceinture, il était juste épuisé. Les combats de la journée avaient été très violents, et aucun réel vainqueur ne s’était dessiné. Les armées s’étaient rencontrées dans la plaine et l'infanterie s’était précipitée l’une sur l’autre. Les archers en retrait bombardaient le champ de bataille à distance faisant autant de victimes alliées qu’ennemi, et les cavaleries, tentant de contourner les flancs, se heurtaient aux mêmes armes en face. Les deux camps se battaient de la même manière, les deux camps avaient lus les mêmes livres de stratégie, les deux camps avaient étudié ensembles, s’étaient entraînés ensembles. Ils n’auraient jamais dû en arriver là. Allongé sur sa couchette, il se retourna vers celle de son ami. Il était tombé aujourd’hui, une lame en travers de la gorge. Ils avaient grandis ensembles, s’étaient enrolés ensembles, et ne s’étaient jamais lâchés d’une semelle, toujours soutenus, toujours suivis. Et aujourd’hui, la fatigue ne lui laissait même plus la force de pleurer. Il sentait son estomac réclamer à manger, mais il savait aussi que s’il tentait d’avaler quoique ce soit, il le rendrait aussitôt comme il l’avait fait plusieurs fois dans la journée devant le charnier.

 

Myrek pesta. La condition déplorable de l’armée Cintienne ne jouait vraiment pas en leur faveur. Depuis le début de la guerre, leurs victoires se comptaient sur les doigts, tandis que les armées Thérencienne continuaient d’avancer dans le territoire. A ce rythme là, il n’y aurait plus personne pour défendre la capitale quand ils y seraient repoussés. L’homme se prit la tête dans les mains et inspecta la carte qui était étalée sur la table. Les petites figurines s’en moquaient bien du jeu des hommes. Elles étaient déplacées, couchées, mais inexorablement elles reculaient, disparaissant de la table. Seul un miracle pourrait les sauver. Et pour que lui le général en chef en vienne à penser cela, c’était que la situation était réellement désespérée.

 

Myrek était essoufflé. Il était parti du château très tôt au matin, il n’aurait pas voulu tomber sur une patrouille ennemie au milieu de la campagne ravagée par la guerre. D’autant qu’il devait se presser, le message était urgent ! Le prince aurait trouvé un moyen de renverser le cours du conflit. Tout le monde en ville parlait de miracle, de pouvoir mystique venant de chez les elfes qui pourrait les sauver. Tout le monde avait bien vite oublié la cause de la guerre quand on leur présenta la porte de sortie. Au balcon du château, le prince était apparu accompagné d’un homme. Personne ne l’avait jamais vu, personne ne savait qui il était, mais le prince semblait lui faire toute confiance. Il avait donné des instructions. Les armées devaient effectuer une retraite générale et toutes se retrouver non loin de la ville pour attendre l’ennemi. Là, l’homme utiliserait une magie nouvelle qui pourrait offrir la victoire à Namas Cintas. C’était inespéré ! La magie n’a jamais été aussi puissante ! Les mages sont au mieux des soldats un peu plus forts que la moyenne, mais au point d’anéantir une armée ? Le messager avait hâte que tout cela prenne fin, et il n’était pas le seul. Il redoubla d’efforts dans sa course, il fallait qu’il arrive le plus rapidement possible.

 

Myrek voyait les armées au loin. Du haut des remparts, il ne pouvait réellement apprécier la scène dans son entièreté, mais il parvenait tout de même à voir que les hommes étaient désorganisés, que les blessés étaient nombreux, et qu’elle était très réduite. Il espérait que le prince ne soit pas devenu fou. Tout miser sur un mage sortit de nulle part, cela relevait de la folie ! Qu’est-ce qu’il pourrait bien faire ? Faire tomber la neige ? Faire des lumières dans le ciel ? Jamais un mage n’a pu retourner le cours d’une guerre, et le prince a pourtant l’air si sûr… D’ailleurs il arrivait sur les remparts au-dessus de la porte de la ville. Accompagné de sa garde personnelle à l’armure reluisante en ces temps de crise, et accompagné de cet homme mystérieux, dont le nom même n’est pas connu. Il les vit discuter, puis, l’homme sortit un livre de sa cape. Il l’ouvrit et commença ce qui sembla être une incantation. Les personnes autour s’éloignèrent quand de la lumière commença à se rassembler au-dessus des pages. Celle-ci grossit de plus en plus tandis qu’elle s’élevait au-dessus du mage. Cela semblait être un sort très visuel, mais alors que cela grossissait, le garde fut pris d’une étrange impression. La lumière était terne, elle ne semblait pas émettre de chaleur, et il sentit quelque chose, une présence, une force, l’englober petit à petit. Comme une main se resserant sur lui, une main attrapant son cœur et faisant peser son poids dessus.

Sa vue se brouilla, et en clignant des yeux, il se retrouva sur le champ de bataille.

Myrek était blessé, pantelant, à genoux au sol. Il venait de recevoir un coup mortel, il le savait. Tout autour de lui, ses camarades et ses ennemis, tombés au combat, gisant dans leur sang. Il voyait le combat faire rage autour de lui. Les lignes étaient brisées, et la bataille était anarchique. Tout le monde l’ignorait. Après tout, un homme à terre ne représentait plus réellement de danger. Il n’aurait même plus eu la force de tenir son arme de toute manière. Il allait certainement fermer les yeux dans quelques instants et ne plus les rouvrir. Il pensa à sa femme et à ses enfants. Cela faisait des semaines qu’il ne les avait pas vus, des semaines qu’ils les avaient laissés à eux-mêmes dans l’enceinte de la cité. Il espérait qu’au moins son sacrifice ne serait pas vain et qu’ils survivraient. Il leva les yeux au ciel, il pouvait encore prier. Mais la lumière était étrange. Alors qu’il était d’un bleu éclatant, il paraissait maintenant terne, sans vie. Il vit autour de lui des reflets étranges, comme si un phare s’était allumé en ville. Rassemblant ses dernières forces, il se retourna, et vit une gigantesque boule de lumière au-dessus des portes. Elle semblait attirer la lumière alentour, la dévorer, et il sentait comme un poids, une chape de plomb se poser dans l’air, sur ses épaules. Il vacillat, sentant la vie le quitter, mais il tint bon. Il tint bon, tandis qu’autour de lui, les corps au sol furent secoués de spasmes. L’un d’eux le mit à terre, et impuissant, il les vit se relever un par un. Les hommes autour arrêtèrent de se combattre et se regardèrent, terrifiés. C’est alors qu’un des morts attaqua un soldat ennemi. Celui-ci se défendit et le transperça de son épée, mais cela n’arreta pas son assaillant qui lui planta l’épée qu’il avait ramassée dans le poitrail.

Clignant des yeux, il se vit à la place du soldat attaqué.

Myrek avait mal, l’épée lui avait traversé le torse, et son adversaire tentait de la retirer accompagné d’un râle inhumain. Son visage était déformé, du sang coulait encore de la blessure mortelle qui l’avait tué, et dans ses yeux, une lueur violette donnait au visage une apparence sinistre. Le soldat tomba à terre alors que son adversaire, son arme récupérée, se tourna vers un autre homme. Ils étaient nombreux, et l’homme qui agonisait à l’instant par terre venait lui aussi de se relever. Cela voulait-il dire que lui aussi allait se relever ? Quand sa blessure aurait fini de l’achever, il deviendrait un de ces monstres ? Il sentit la vie quitter son corps et il tomba au sol.

Clignant des yeux, il se retrouva sur le mur d’enceinte de la ville.

Myrek ne croyait pas ce qu’il voyait. Il avait demandé à ce qu’on lui apporte une longue vue, et c’était tout simplement magnifique ! Ce que lui avait raconté le mage était vrai ! Les hommes morts se relevaient et continuaient le combat ! Comment pouvait-il perdre comme ça ? Même les soldats ennemis rejoignaient ses rangs, son armée ne pouvait que grandir, et ces créatures étaient même plus efficaces que les vrais hommes ! Ceux-là ne le décevrait pas il le savait. Il avait trouvé étrange la lourdeur qui s’était installée dans l’air quand le mage avait lancé son sort, mais maintenant qu’il en voyait les résultats, cela valait bien tous les sacrifices. Une armée de mort vivant pour raser la cité de son rival. Si seulement il avait bien voulu se retirer de la course pour courtiser la dame de Londolion, si seulement il n’y avait pas en plus eu tous ces complots pour se garantir la suprématie sur les duchés du sud, il n’aurait pas eu besoin de l’insulter, et la guerre n’aurait pas été déclarée. Mais ce problème allait être très vite réglé semblait-il. Retirant la longue vue de son oeil, il la tendit à son garde, gardant les yeux rivés sur le champ de bataille. Quel régal, il allait être inarrêtable.

“Garde, débarrasse moi de cet objet !” pesta-t-il alors qu’il avait toujours la main tendue, paume ouverte vers le haut.

Trouvant le délai de réponse étrangement long, il tourna la tête et vit que son garde était à terre, les yeux vitreux, semblant vide de vie. Se retournant, il vit ses trois gardes à terre, et sentit une douleur fulgurante dans la poitrine. Il tomba à genoux devant le mage qui continuait son incantation. Des flux de lumières étaient attirés par son sort, mais ce qui semblait venir de l’air ambiant, semblait aussi venir des spectateurs dans le champ de vision du prince. S’approchant du rebord, il regarda en contrebas, et vit que dans les rues, une grande partie des citoyens étaient à terre, immobiles.

Se relevant difficilement, il regarda à nouveau le champ de bataille. Ne restait plus debout que les morts, et petit à petit, les corps se relevaient, l’un après l’autre. Se retournant vers le mage, il vit un rictus sur ses lèvres.

“Qu’avez-vous fait ? Pourquoi sont-ils tous à terre ? Que m’arrive-t-il ?” cria-t-il du peu de forces qu’il lui restait.

Le mage semblait comme en transe, sur ses bras, des arabesques se dessinaient alors qu’il continuait à réciter sa litanie. Le prince se sentait sombrer dans l’inconscience. Le mage lui avait menti. Il lui avait promis une armée d’immortel, mais il allait prendre la vie de tous les habitants de Namas Cintas, lui y compris ! Pris de rage, il lutta contre le poids qui le ramenait à terre et parvint à se relever. Il vit plus clairement les tentacules de lumières partant de tous les habitants et se rattachant à la boule de lumière au-dessus d’eux. Il vit aussi des liens semblables semblant s’enfoncer sous terre, ou se perdre dans une dimension différente, il n’aurait su l’expliquer. Mais il savait expliquer qu’il s’était fait berner, et que ce mage face à lui s’était joué de lui. Rassemblant ses dernières forces, il dégaina son épée et lui enfonça dans la gorge.

Son air surpris fut délicieux pour le prince. Mais alors qu’il tombait du rempart, le livre abandonné derrière lui, celui-ci restait suspendu dans les airs. La chape de plomb qui pesait sur le prince était toujours là, et il tomba à genoux, privé d’énergie. Le sort ne s’était pas arrêté. Autour de lui, ses gardes commençaient à se relever, comme les hommes sur le champ de bataille auparavant. Se traînant jusqu’au livre, il tenta de s’en emparer, mais il semblait figé en l’air. Alors, levant son épée, il l'abattit du peu de force qui lui restait sur le codex. Une lueur intense empli son champ de vision et la boule de lumière explosa en une multitude de couleurs et une onde de choc qui lui ôta son dernier souffle.

 

Myrek était assis en tailleur sur le sol devant chez lui. Il jouait avec un petit bateau en bois que son père lui avait fait avant de partir. Il devait bientôt revenir maman avait dit. En attendant il devait rester sage, et donc il jouait sagement en bas des marches du porche. C’était bientôt l’heure de manger. Il n’y avait pas beaucoup à manger dernièrement, mais il y avait toujours assez parce que ses parents étaient riches ! Et tous les villageois les aimaient bien ! Mais avec la guerre, tout le monde était partit, il ne restait plus personne… Et… Oh, le devint très beau, pleins de couleurs, et une lumière aveuglante l’atteignit.

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